Cette thèse part d’un questionnement sur la relation d’aide sociale et sur ceux qui en formulent les doctrines et en réalisent les modalités d’action. Qu’est ce qu’aider ? D’où vient cet « esprit » qui conduit à la conviction que l’Autre a besoin de moi, que d’aucuns ont besoin de nous ? Comment se construit la posture-individuelle ou collective- qui consiste à se mêler des affaires -du malheur, en l’occurrence- des autres ?

En complémentarité des deux figures séculières qui organisent cette relation : le technicien (travailleur social, médecin, architecte, etc.) et le politique, une troisième figure s’impose : le militant social, qui a comme registre de légitimité sa conviction et sa capacité à formuler et organiser le rapport aux classes populaires. On s’intéresse ici à cette troisième figure, aux doctrines, aux idéaux et aux dispositifs d’action que les militants produisent, et à la manière dont ils pensent et se pensent.

L’ensemble de ce travail soulève une réalité complexe : celle du rôle des clercs dans le militantisme social, et celle du rapport du militant au peuple, à partir de trois grands registres de questions que nous cherchons à élucider :

– La question de la cause sociale, celle de la misère du peuple et de son soulagement, en même temps que son hygiénisation,
– la question ouvrière, partagée, voire clivée, entre disciplinarité et encadrement d’une part, émancipation et révolution de l’autre,
– la question ethnique urbaine qui prend la forme et les ambiguïtés du rapport colonial.